Pour les absents, voici un petit aperçu de l’exposé que j’ai fait à La Bertais sur demande de Yann à l’occasion de l’ Assemblée Générale, placée cette année sous le signe de l’Ecologie.

Le mot “biodiversité” désigne la totalité de la diversité biologique sur Terre. Elle est prise en compte au niveau intraspécifique, sous forme de différences génétiques entre individus au sein des espèces, au niveau interspécifique (combinaison du nombre et de la distribution d’abondance des espèces) et enfin au niveau des communautés ou des écosystèmes, c’est à dire les différents assemblages d’espèces.
Le nombre d’espèces varie beaucoup suivant les groupes taxonomiques d’animaux ou de végétaux. La distribution actuelle de la biodiversité est hétérogène sur la planète, avec une tendance à décroître des tropiques vers les pôles.
Si l’estimation de la valeur esthétique ou spirituelle de la nature peut sembler difficile ou illusoire, il est possible d’évaluer la valeur purement économique de la biodiversité. Elle représente tout d’abord une valeur liée à un usage direct (par exemple le bois, les stocks de poissons, les fibres naturelles…) ainsi qu’une valeur liée à un usage indirect (par exemple la production d’oxygène, la régulation du climat par les forets, la pollinisation, le recyclage des nutriments…). Elle présente aussi une valeur d’option (par exemple les futures sources de nourriture, de médicaments, de fibres, encore inconnues…), et enfin une valeur d’existence, c’est à dire la valeur économique d’un habitat ou d’une espèce, ce que les gens seraient prêts à payer pour éviter sa disparition… ce qui pose le problème des espèces charismatiques.

Pour mieux cerner la notion de biodiversité, il faut élargir notre vision anthropocentrique de la planète. L’Homme est un nouveau venu dans l’Histoire de la planète, puisque la Vie est apparue sur Terre entre 3.8 et 3.5 milliards d’années, et que le plus vieux hominien date seulement de 4.4 millions d’années… Cette longue histoire d’évolution biologique a vu cette fabuleuse diversification de la Vie, telle que nous la connaissons actuellement.
Par le passé, deux évènements catastrophiques majeurs, d’origines encore hypothétiques, ont provoqué des pertes brutales de biodiversité, touchant tantôt l’intégralité des formes de Vie (crise Permo-Trias), tantôt certains groupes taxonomiques en particulier (dinosaures et ammonites par exemple pour la crise Crétacé Tertiaire). La crise de biodiversité que nous traversons actuellement est différente, parce que les extinctions actuelles sont dues à l’Homme (par le biais de chasse ou pêche non durables, de la disparition des habitats en raison de la pression démographique, de la pollution, du réchauffement climatique… ). De plus, les espèces disparaissent beaucoup plus vite que durant les crises précédentes. Selon l’estimateur le plus conservatif de E Wilson (1990), trois espèces disparaissent par heure, soit 27 000 par an. Dans 30 ans, l’estimateur est de plusieurs centaines par jour. En raison des multiples interactions entre espèces au sein d’un écosystème, la disparition d’une plante entraîne la disparition de 30 espèces d’insectes ou de mammifères. 
Depuis 400 ans, 611 espèces d’animaux ont disparu. En parallèle de cette perte de diversité biologique, il se produit une perte de diversité culturelle (sur 6000 langues parlées dans le monde, au moins la moitié vont disparaître au cours de ce siècle). Une très faible minorité d’espèces, au contraire, prolifèrent, ce sont les espèces opportunistes, invasives, comme les étourneaux, les cyanobactéries dans eaux polluées… ci-dessus : thyalicine (mammifère – espèce disparue)
Face à ce constat, la responsabilité de l’Homme est inévitablement engagée. Pour pouvoir préserver la biodiversité, il faut tout d’abord connaître le nombre d’espèces existant actuellement et savoir comment elles sont distribuées. Et pourtant, la plupart des espèces ne sont pas décrites. Les travaux de taxonomie avancent peu en raison du manque de financement pour ces études. La biodiversité au sein de certains groupes taxonomiques (les insectes par exemple), de certains habitats (comme l’environnement marin profond, la canopée des forets tropicales…) est encore largement inconnue.
Les études scientifiques sont donc fondamentales, et les disciplines récentes de la biologie et de la génétique de la conservation permettent d’obtenir des données impartiales et précieuses en vue de préserver la biodiversité sur le long terme, sous forme d’habitats, d’espèces…
Au niveau politique, la Convention de Rio, signée par 150 dirigeants lors du sommet de la Terre à Rio en 1992, vise à la conservation de la biodiversité pour la première fois. Les partis de la Convention se sont engagés à limiter la perte de la biodiversité de façon significative d’ici 2010. En Europe, le Réseau Natura 2000 vise à protéger plus de 1000 espèces animales et végétales, et 200 habitats types.
A un niveau local, de multiples actions concrètes sont possibles, en rejoignant les associations de protection de l’environnement (nombreuses en Bretagne, par exemple Bretagne Vivante, qui réalise des inventaires d’espèces, met en place de réserves naturelles, travaille à l’éducation et la sensibilisation à l’environnement, le Groupe Mammalogique Breton, spécialisée sur les mammifères menacés : loutre, chauves-souris…).
Au jardin,
on peut favoriser quelques havres de paix pour la Vie (prairies naturelles, arbres et buissons de variétés locales, qui offrent ressources et abri aux espèces natives, zones humides…).
Dans notre société de consommation, nos multiples achats sont lourds de conséquences. Il est possible de choisir du bois provenant de forets gérées durablement grâce au logo FSC (Forest Stewardship Council, qui assure un suivi du bois depuis la forêt jusqu’au point de vente). On peut soutenir l’agriculture biologique (par exemple grâce aux AMAP : Association pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne)… et aussi simplement, consommer moins, ou plus simple ?
Notre impact individuel rapport à la biodiversité est fondamental. Peut-être faut-il commencer par se rendre compte de la richesse du monde vivant auquel nous appartenons, et l’apprécier ! Nous sommes tous interconnectés, et chacun de nos actes a une conséquence sur ce qui nous entoure...
Marie-Le Goff-Vitrry (Docteur en écologie moléculaire, spécialisée en biologie marine)