Auteur/autrice : Georges Morant

  • L’histoire d’amour qui brise le cœur (1)

    L’expérience du cœur qui se brise amène à un choix. Nous pouvons nous fermer, de douleur et de ressentiment de ne pas avoir ce que nous voulons. Ou, si nous prêtons attention à ce que désire réellement notre cœur, nous découvrons qu’il veut s’ouvrir tout grand, en dépit de la douleur que nous ressentons. Lorsque nous laissons notre cœur s’ouvrir tout grand, une douceur commence à émaner de nous comme un nectar. Comme le formule le maître soufi Hazrat Inayat Khan : « La chaleur de l’atmosphère de celui qui aime, l’effet incisif de sa voix, le charme de ses paroles, tout cela vient de la douleur de son cœur. » C’est l’un des plus grands secrets de l’amour. Au lieu d’essayer d’éviter cette douleur, ce qui est de toute manière inutile, celui qui aime peut utiliser pour se transformer lui même ; pour développer une tendresse et une compassion invincibles et, comme l’ont découvert les troubadours, pour devenir un guerrier héroïque au service de l’amour.

    Cette qualité de cœur brisé de la dévotion pure est particulièrement poignante, comme la tristesse souvent présente dans les poèmes et les chansons d’amour les plus émouvants. C’est ce que Chogyam Trungpa appelait « le cœur de tristesse authentique ». C’est une plénitude de sentiment qui s’élève en réponse au fait d’aimer quelqu’un que nous ne pouvons en définitive jamais posséder. Celui ou celle que nous aimons va mourir ; nous mêmes- allons aussi mourir ; tout est voué à disparaître. Même si nous nous marions, le mariage va se transformer et, pour finir, disparaître aussi. Il n’y a rien à quoi s’accrocher. Rien ne peut nous sauver de notre solitude. Plus nous aimons notre vie, notre bien –aimé(e), notre maître spirituel, plus nous nous sentirons le cœur brisé , tôt ou tard.

    La qualité douce de cette tristesse est intéressante. En anglais, le mot sad(triste) étant relié à satisfied(satisfait) ou à sated(comblé, rassasié), il révèle que la tristesse authentique est une plénitude, une plénitude du cœur qui veut déborder. Comme l’a formulé Trungpa : « Cette sorte de tristesse est inconditionnée. Elle survient parce que votre cœur est totalement exposé. Vous souhaiteriez répandre le sang de votre cœur, donner votre cœur aux autres. » De là s’élève un désir de dissoudre toutes les barrières entre soi et les autres, entre la vie, à l’intérieur, et la vie là, à l’extérieur.

    Toutes nos idées à propos de l’amour romantique sont nées de la découverte de la passion dévotionnelle des amours courtois de Provence. Malheureusement, notre culture ne comprend plus désormais la dimension dévotionnelle de la passion ;au lieu de cela, nous considérons la passion comme un moyen de « faire nôtre ». Nous avons perdu le sens sacré originel de l’amour passionné.

    Nous avons aussi perdu le sens sacré originel du chemin spirituel, qui implique de s’abandonner à un principe transcendant qui est plus grand que nous –mêmes et guide nos vies. Quand vous rencontrez un maître qui réellement vous va droit au cœur, quand vous tombez amoureux d’un maître et d’un enseignement, cela vous sort de vous même, cela vous arrache à votre petit monde confortable de schémas habituels. Bien que vous puissiez être attiré par ce maître et cet enseignement, vous ne pouvez les posséder de quelque manière conventionnelle que ce soit. La rencontre d’un maître authentique suscite donc à la fois toute vote saisie conditionnelle et votre passion inconditionnelle. Cela vous permet de travailler sur la passion qui fait partie intégrante de votre chemin.

    Comme vous apprenez à distinguer entre saisie et dévotion, vous commencez à comprendre la nature plus profonde de la passion- en tant que porte vers l’expérience d’abandon. Le chemin spirituel est une histoire d’amour qui brise le cœur, parce que l’enseignement ultime, qui n’est rien d’autre que la vie elle même, traite de l’abandon et non de l’acquisition. Dans le chemin spirituel, il est question de « perdre ça ». Du point de vue de l’ego, cela semble choquant ou menaçant. Cependant pour notre être, qui se sent encombré de nos compulsions égocentriques, c’est un soulagement. C’est ce qui rend la passion tellement intrigante : perdre ça – nous défaire de schémas de personnalité anciens qui nous enferment- est à la fois totalement effrayant et excitant.

    Tout comme la flamme de la passion non consommée de l’amour courtois purifiait le cœur, notre amour non récompensé pour un maître spirituel peut intensifier notre désir de faire un avec la vie plus grande que ce maître représente. Nous ne pouvons faire cela qu’en rejoignant le maître dans l’état éveillé dans lequel il demeure. Et la seule façon de le faire est de nous dévouer à la vie plus vaste et d’enlever nos barrières intérieures qui entravent une ouverture, une conscience et une authenticité plus vastes. Une fois que nous cessons de nous donner tant de mal pour obtenir des biens spirituels, la chaleur de la passion inconditionnelle peut commencer à illuminer chaque aspect de nos vies.

     

    JOHN WELWOOD – « Pour une psychologie de l’éveil » – Editions de la Table ronde
    Chapitre 19 : « la passion en tant que chemin ». pages 344-346.

  • Swâmi Prajnanpad – Extrait de « Lettres à ses disciples »(1)

     

     DU MOI

    Votre propre moi est votre seule et meilleure divinité. S’identifier c’est projeter son petit moi partout. Vous ne connaissez que vous-même ; quand vous voyez un autre, au lieu de le voir, c’est vous-même que vous voyez. Vous dites couramment :  » il n’aurait pas dû agir ainsi. » Ce qui est une autre manière de supprimer l’autre. Vous refusez de lui concéder une existence séparée. (…) Vous ne pouvez pas voir l’autre, si vous vous projetez en surimposition sur lui. (…) Mais si vous reconnaissez :  » il est différent » , tout sera en vous, et vous deviendrez vaste, tolérant, compréhensif, incluant tout, pénétrant tout. Vous n’éprouverez plus ni déception ni souffrance.

    Chacun reste prisonnier de son propre moi. Où est la racine ? Dans son enfance. L’enfant ne connait rien d’autre que son propre intérêt. Rien d’autre.

    Même un Mahâtma, un grand sage, qui considère chacun comme lui-même, fait tout dans son propre intérêt. Simplement « sien » dans son cas, inclut le monde entier. Son propre intérêt inclut tout. Ainsi, lui aussi, agit dans son propre intérêt, pour lui-même, mais son « lui-même » n’est fixé en aucun point particulier. Lui aussi agit pour lui seul. Pourquoi ? Parce que c’est un fait : tout sujet, toujours, sous quelque forme que ce soit, n’agit que dans son propre intérêt. La différence réside simplement dans la largeur ou l’étroitesse de ce qu’on appelle son propre intérêt. Pour celui qui limite son intérêt à une seule chose, la perte de cette seule chose semble être la perte de tout ce qu’il possède. Pour celui qui possède deux objets, la perte d’un objet ne représente pas la perte de la totalité. Celui qui n’a qu’un enfant perd tout s’il le perd. Mais celui qui a dix enfants n’est pas aussi malheureux, s’il en perd un seul… Alors si quelqu’un possède tout, que lui arrive il ? Rien. Il ne fait pas de distinction : tout est à lui…bien que pourtant il ne possède rien.

    Extrait du magazine « Psychologies » Décembre 2016 – janvier 2017. Hors série « 20 maitres de vie ». p 98

  • Swâmi Prajnanpad, la voie de l’ici et maintenant (2)

     

    EXTRAITS

    « LETTRES A  SES DISCIPLES »

     

     

    SE LIBERER DU PASSE ET DU FUTUR

    Il n’y a pas d’autre esclavage dans la vie que celui du passé. Celui qui est libre du passé est libre, il est mukta « libéré ». Pourquoi? Parce que seul le passé est la cause du futur. Le futur n’est rien d’autre que la prolongation du passé. C’est le passé insatisfait qui cherche sa satisfaction dans le futur…

    Au lieu de vivre dans le présent, où est-ce que vous vivez vraiment? Apparemment bien sûr, vous avez l’air d’être ici et maintenant, mais vous vous trahissez par votre comportement et vos actions montrent que vous êtes dans le passé et dans le futur. (…) Pourquoi dans le futur? Parce que vous n’êtes pas libre du passé, alors vous pensez toujours au futur. (…) Le futur cependant n’a aucune réalité indépendante qui lui soit propre. C’est seulement le passé qui cherche sa satisfaction dans le futur…

    Être libre, c’est être libre de papa-maman, rien d’autre.

    C’est l’attente, c’est cette attente qui est la cause de tous les soucis (…) Vos espoirs et vos désirs sont en vous, alors que les actions des autres et les événements se déroulent dans le monde extérieur. (…) Alors ? L’attente n’est-elle pas inutile ? Les choses peuvent tourner comme vous vous y attendez ou non. Alors ? Espérer quoi ? Vous devez accepter ce qui est arrivé et ce qui arrive. Il n’y a pas de place pour l’espoir !

    La peur que quelque chose arrive est pire que la chose elle-même. Les peureux meurent bien des fois avant l’heure de leur mort. La peur doit être bannie de votre vie, car elle est irrationnelle et bloque l’action.

    Quand vous êtes déprimé, expérimentez la dépression et laissez la se dissoudre. Non, elle ne durera pas. Elle est venue et elle s’en ira. Ce qui vient toujours s’en va.

    Nous sommes libérés parce que nous acceptons, mais nous sommes prisonniers de ce que nous refusons.

  • Svâmi Prajnanpad/ La voix de d’ici et maintenant

    LES CLÉS DE SA PENSÉE

    VIVRE AU PRESENT

    Ce qui fût n’est plus, ce qui sera n’est pas encore.  » Qui crée alors le passé ou le futur ? Seulement le mental »

    Nous sommes prisonniers du passé, par l’inconscient, et de l’avenir, par l’attente. » Le passé insatisfait enserre le présent dans ses griffes », et nous voue à l’espérance, donc à une nouvelle insatisfaction. L’espoir et la peur sont les plus grands ennemis de l’homme : parce qu’ils nous séparent du présent, du réel, de tout, parce qu’ils nous enferment dans l’avenir et l’égo. On ne peut y échapper qu’en se libérant du passé. Ainsi la liberté et l’éternité vont ensemble.

    TOUT EST DIFFÉRENT

    TOUT CHANGE

    Tout est différent toujours : il n’y a pas deux grains de sable identiques, ni deux mentals semblables. C’est ce qui nous voue à la solitude :  » Personne ne peut agir suivant le désir de quelqu’un d’autre;chacun est différent et séparé » C’est aussi ce qui nous voue au changement, qui n’est que la différence dans le temps. Deux instants successifs ne sont jamais identiques :  » Tout change à chaque instant. Ce n’est qu’un courant qui s’écoule. » Il n’y a pas d’êtres;il n’y a que du devenir. C’est ce que l’égo refuse : il voudrait  » rester intact «  et ne le peut;il s’interdit de vivre, pour ne pas mourir.

     » VOICI LA CLÉ : AUCUN JUGEMENT DE VALEUR »

    ACCEPTER L’ÉMOTION POUR S’EN LIBÉRER

    Qu’est que le mental ? Toute pensée en nous qui souhaite autre chose que le réel. C’est le contraire de la vérité. C’est mayâ (« l’illusion »). Comment savoir alors si l’on est dans la vérité ou le mental ? Par la présence ou l’absence d’émotion. L’émotion est le critère : si je suis ému, c’est que je superpose au réel autre chose que ce qu’il est (mon désir, mon attente), qui m’en sépare et m’enferme dans le mental. Il faut donc accepter l’émotion, pour s’en libérer.

    VOIR CE QUI EST COMME CELA EST

    Le contraire de l’illusion, c’est la vérité. Le contraire du mental, c’est voir. Ne pas penser, ne pas interpréter, ne pas juger, ne pas comparer, mais voir ce qui est comme cela est. Aucun jugement de valeur. Aucun refus. Aucune émotion (il n’y a plus que des sentiments). Accepter ce qui est. C’est la seule façon de le transformer. « Restez dans le présent : agissez, agissez, agissez! » Et lorsque l’on arrive pas à accepter ce qui est ? Alors l’émotion est là, qu’il faut donc accepter. Ni refus, ni dénégation. Ni espérance, ni regret. Cela passe par la connaissance de soi : accept yourself and be happy (  » accepte -toi et sois heureux »)

    « ÉVITEZ DE TROP PENSER

    « VOYEZ SEULEMENT LE PRÉSENT ET AGISSEZ. C’EST LA CLE

    D’UN COMPORTEMENT VRAI ET POSITIF »

    ÊTRE UN AVEC TOUT

    L’expérience spirituelle la plus haute est celle de l’unité. Nous ne sommes séparés de tout que par le mental- que par nous mêmes. La vérité, au contraire, nous unit : parce qu’elle est une, parce qu’elle est universelle, et parce qu’elle est infinie. Il ne s’agit pas de brimer l’égo, mais de l’ouvrir : devenir comme « un cercle devenu si large qu’il ne peut plus rien entourer, un cercle d’un rayon infini : une ligne droite! ». Alors seulement le bonheur peut advenir. Il n’y a pas d’égo heureux, ni de bonheur égoïste. Il faut donc se libérer du moi, pour s’ouvrir à tout. C’est le chemin de la sagesse. C’est le chemin du bonheur. « Pour aller où ? Là où vous êtes. Tout est ici et maintenant. »

    André Comte-Sponville dans le numéro hors série de « Psychologies » de décembre-janvier 2017 consacré à 20 maîtres de vie : Le Dalai Lama, Freud, Gandhi, Jésus, Montaigne, Prajnânpad, Socrate…

    PS : commencez bien par l’introduction et préparez vous à pratiquer, ah, ah, ah

     

  • Happy new year

    En un instant, saisi par un sentiment de bien être

    Le mot qui jaillit en premier est gratitude, suivi de très près par reconnaissance. Je sais que je suis. Voilà bien une des caractéristiques les plus essentielles de l’être humain et en même temps, l’un des défis les plus difficiles à relever

    Qui suis – je vraiment ?

    Pourquoi dit on que le silence est d’or ? Il doit bien y avoir une explication

    Le silence est d’or parce qu’il semble bien que cela soit la dernière marche avant Cela, Dieu, quel que soit le nom que l’on donne; même, si ce silence semble parfois  se confondre avec Cela

    Le silence est d’or parce qu’il s’apparente à cette source si mystérieuse de la vie. Il n’appartient à aucune catégorie, aucun classement, nul formatage. Il semble être une ouverture vers l’infini. Et encore, quand , j’écris infini, c’est très présomptueux de ma part. Le mot infini masque mon ignorance. Le silence pointe avant tout vers un mystère

    Il ouvre des portes si larges, si ouvertes vers :  » je ne sais pas »

    Il recouvre tout, dépasse l’entendement, unifie la totalité en un instant

    Il supprime toute frontière, abolit toute séparation

    Le silence est d’or, parce que l’or représente le métal le plus précieux qui soit. Il donne le vertige, attise le feu intérieur de chacun (e) pour brûler jusqu’à Absolu. Il nous met en relation avec nos peurs et nos espoirs les plus profonds. Il nous met en face de nos responsabilités les plus hautes. Il nous met au défi d’accomplir nos plus hautes destinées. Il nous envoie un message si flamboyant que nul ne saurait l’éviter

    Au travail, semble il nous dire, vous, les êtres humains, ne gâchez pas cette si précieuse opportunité. A Nous de jouer, notre destin est pour une part entre nos mains

    Bonne année, très bonne année à toutes et à tous

  • La présence éveillée (2)

    TenzinPalmo

     » On peut comparer l’état ou nous sommes au fait de regarder à travers une paire de jumelles : la perspective est floue. Quand on vit quelque chose, on le fait au travers du filtre des idées, des préjugés et des jugements de valeur. Par exemple, quand on rencontre des gens, on ne les voit pas tels qu’ils sont réellement. On les considère en fonction de ce que l’on pense d’eux, de l’amour ou de l’aversion qu’on leur porte, des personnes qu’ils nous rappellent, de l’éventail de qualités qu’ils possèdent. On ne les perçoit pas tels qu’ils sont en eux mêmes. Et il en est ainsi de tout ce que l’on perçoit : tout ce que l’on voit, mange, entend ou touche. Ces perceptions sont immédiatement réinterprétées en fonction des pensées et de l’expérience qu’on possède.

    On peut se dire :  » Et alors ? Ça n’a pas d’importance. » Mais ce qui se produit, c’est que nous sommes toujours en retrait par rapport à cette expérience elle-même et que de fait nous sommes de plus en plus conditionnés et « robotisés ». Nous ressemblons à des ordinateurs. Quelqu’un appuie sur un bouton, comme on le dit si bien, et on produit la réponse conditionnée correspondante.

    Il faut que nous clarifions profondément notre vision de façon à voir les choses telles qu’elles sont, comme si nous les découvrions pour la première fois. Les Tibétains disent : « tel un petit enfant qui regarde les peintures dans un sanctuaire ». Ce jeune enfant voit les couleurs et les formes sans jugement, son esprit est pur. C’est l’état d’esprit qu’il faut intégrer dans notre vie quotidienne. Si l’on s’y exerce, et sans qu’il soit nécessaire de faire quoique que ce soit d’autre, notre état changera nécessairement. »

    Tenzin Palmo

  • L’Autre rive – Etty Hillesum

    etty_hittesum

     » (…) c’est une expérience de plus en plus forte chez moi en ce moment : dans mes actions et mes sensations quotidiennes les plus infimes se glisse un soupçon d’éternité. Je ne suis pas seule à être fatiguée, malade, triste ou angoissée, je le suis à l’unisson de millions d’autres à travers les siècles, tout cela c’est la vie ; la vie est belle et pleine de sens dans son absurdité, pour peu que l’on sache y aménager une place pour tout et la porter tout entière en soi dans son unité ; alors la vie, d’une manière ou d’une autre, forme un ensemble parfait. Dès qu’on refuse ou veut éliminer certains éléments, dès que l’on suit son bon plaisir et son caprice pour admettre tel aspect de la vie et en rejeter tel autre, alors la vie devient en effet absurde : dès lors que l’ensemble est perdu, tout devient arbitraire.

    (…) je suis surtout reconnaissante de n’éprouver ni rancœur ni haine, mais de sentir en moi un grand acquiescement qui est bien autre chose que de la résignation, et une forme de compréhension de notre époque, si étrange que cela puisse paraître! Il faut savoir comprendre cette époque comme on comprend les gens ; après tout, c’est nous qui faisons l’époque. Elle est ce qu’elle est, à nous de la comprendre en tant que telle, malgré l’effarement que son spectacle nous inspire parfois.

    (…) Une chose est sûre : on doit tout accepter, être prêt à tout et savoir qu’on ne saurait nous prendre nos retranchements les plus secrets ; cette pensée vous donne un grand calme intérieur et l’on se sent à même d’accomplir les démarches pratiques réclamées par les circonstances.

    (…) Là ou l’on est, être présent à cent pour cent.

    (…) Le grand obstacle, c’est toujours la représentation et non la réalité. La réalité, on la prend en charge avec toute la souffrance, toutes les difficultés qui s’y rattachent. On la prend en charge, on la hisse sur ses épaules, et c’est en la portant que l’on accroît son endurance.
    Mais la représentation de la souffrance -qui n’est pas la souffrance, car celle ci est féconde et peut vous rendre la vie précieuse- il faut la briser. Et en brisant ces représentations qui emprisonnent la vie derrière leurs grilles, on libère en soi-même la vie réelle avec toutes ses forces, et l’on devient capable de supporter la souffrance réelle, dans sa propre vie et dans celle de l’humanité.

    (…) Je ne pense plus en termes de projets ou de risques : advienne que pourra et tout sera bien. »

    Etty Hillesum, « une vie bouleversée, journal, 1941-1943 « Paris, Seuil, 1985

    PS : J’ai recueilli ce passage dans le livre de André Comte-Sponville :  » De l’Autre côté du désespoir »

  • Tiens, tiens, tiens, cela me rappelle quelque chose !

    aguettant

     

    Un évènement devient un traumatisme persistant lorsqu’il y a refus de l’évènement. Ce  » non » à la réalité provoque une fixation dans le déroulement de la vie psychique dont le fonctionnement en devient perturbé. Seule la reconnaissance de ce processus peut permettre une réconciliation avec le réel et une existence vécue sur le mode du  » oui ».

    Cette attention à toutes les formes de refus de ce qui est, dans chaque situation concrète, permet peu à peu une désidentification vis à vis des contenus de la vie émotionnelle. Le jour où il n’y a plus de refus, on est libre.

    L’enjeu consiste à découvrir cet espace silencieux, illimité, que nous sommes. Nous pouvons alors développer à partir de et espace une nouvelle relation à nos sensations, à nos émotions, à nos pensées.

    Chaque situation, agréable ou douloureuse, se présente comme un défi. Il s’agit de vivre en temps réel une conscience pleinement incarnée n’évitant aucun aspect de la réalité quotidienne, assumant toutes les dimensions de l’être humain, des plus obscures aux plus lumineuses. La véritable liberté est à ce prix.

    Tout ce qui vient d’être dit à l’instant pourrait vous apparaître comme un programme très excitant. Il suffirait à remplir une vie. Mais ce dont il est question dans ce livre n’a strictement rien à voir avec un travail en vue d’obtenir quelque chose.

    Aucun changement n’est à attendre. Vous êtes la réalité qui vous arrive à chaque instant et vous n’y êtes pour rien. Vous vous appropriez la décision de vous transformer; vous vous appropriez l’action, parce que vous ne pouvez pas imaginer une action sans quelqu’un pour la décider. Vous attribuez une cause à un évènement en cherchant ce qui l’ a précédé. Vous confondez une séquence d’évènements avec une relation de cause à effet. En ce qui concerne  » être  » , il n’y a pas succession mais simultanéité.

    Notre vie ne nous appartient pas, nous appartenons à la vie.

    Malo Aguettant dans son livre :  » Rien ne manque à cet instant Tant que vous n’y ajoutez rien »

    Editions Accarias L’originel

     

  • La présence éveillée (1)

    un ermitage

    (…) Quand nous sommes parfaitement conscients, nous sommes attentifs non seulement à ce que nous faisons, mais aux sentiments, aux émotions qui surgissent ainsi qu’aux événements qui se produisent autour de nous. C’est si simple que ça nous échappe! Car on s’imagine que cette présence éveillée doit être quelque chose de plus grand, de plus spectaculaire. Mais il ne s’agit pas de lumières accompagnées de trompettes. C’est très simple. C’est juste là, présent. On pense en général que l’Éveil, ou la réalisation est quelque chose de lointain, un évènement magnifique et fantastique qui transforme tout une fois pour toutes.Mais ce n’est absolument pas le cas. C’est une chose qui est parfois si simple que c’est à peine si on la remarque. Et c’est aussi une chose qui peut se produire à tout moment. Et au moment ou on la voit, ça y est. C’est ça? Cela a toujours été là, mais notre œil intérieur était fermé. Quand tous les moments de la présence éveillée s’associent, alors on devient bouddha.

    Le terme sanscrit qui désigne la vigilance est smirti, sati en pali et drènpa en tibétain. Il est intéressant de constater que tous ces mots signifient « se rappeler ». C’est ce que les catholiques appellent « être en état de recueillement ». Et c’est extrêmement difficile. Être conscient pendant quelques minutes, c’est déjà beaucoup. Si « vigilance » est synonyme de se « souvenir », il en résulte que l’ennemie de la conscience éveillée est l’oubli, la distraction. On est capable d’être conscient pendant quelques brefs instants, puis on oublie. Comment se souvenir d’être conscient ? C’est là tout le problème. Car nous avons cette colossale inertie. Nous n’avons pas tout simplement l’habitude d’être conscients (…)

    Téndzin Palmo dans le livre de Vicki Mackenzie « Un ermitage dans la neige » Nil éditions

  • « God is the highest possibilty of man » Swâmi Prajnanpad

    « Dieu est la plus haute possibilité de l’homme« 

    (…) Arnaud et moi avons rendu visite à un maître soufi en Tunisie. Il parlait de Dieu en des termes qui ouvraient le cœur de façon extraordinaire. Ce maître soufi nous a dit : « Dieu n’est pas quelqu’un qu’on vous présente » voulant dire par là que Dieu n’est pas quelqu’un d’ extérieur à nous. Il a ajouté : « C’est un sentiment qui grandit à l’intérieur de nous » . Cela rappelle les paroles du Christ : « Le Royaume de Dieu est au dedans de vous« . Dieu n’est pas quelque chose d’extérieur à nous. Nous baignons en Dieu. Je me souviens d’une dédicace de Lee Lozowick :  » Nous sommes immergés en Dieu jusque par dessus nos têtes ».

    priere

    (…) C’est notre drame d’être séparé de la Totalité. Un jour, notre ego est né, alors qu’en tant que fœtus nous étions immergés dans la totalité. Nous avons connu cet état, c’est pourquoi cette nostalgie profonde se trouve au coeur de chaque être humain. Cette blessure de la séparation est sans cesse réveillée par tous les abandons que nous avons subi dans notre vie, mais le véritable abandon est d’avoir été coupés de Dieu. C’est la blessure originelle. Nous baignons en Dieu et nous ne le sentons pas. Notre chemin consiste à nous demander comment retirer les obstacles qui nous empêchent de nous sentir en Dieu. La soif que nous avons de Dieu, la nostalgie que nous avons de la Totalité peuvent nous y aider. Donc tu peux prier. D’une certaine façon, on ne prie que soi-même puisque nous sommes immergés en Dieu. « Dieu n’est pas quelqu’un qu’on nous présente« . Ce n’est pas seulement un très grand ami. Pour reprendre la parole de ce maître soufi, c’est un sentiment qui grandit à l’intérieur de nous.

    C’est pour cela qu’il est important que nous vivions des moments un peu particuliers, comme par exemple certains instants en présence d’un maître, car nous sommes alors branchés sur un autre niveau de réalité qui nous permet de pressentir ce qui nous attend.

     

    * Citation de Véronique Desjardins dans le livre : « LA TRAVERSÉE VERS L’AUTRE RIVE » Rencontres au Mexique Editions Accarias L’originel

  • “ Annihilez la distinction entre vous et votre émotion”. Swâmiji

    « Annihilate the distinction between you and your emotion »
    “ Annihilez la distinction entre vous et votre émotion”. Swâmiji

    (…) Je n’ai rien compris à cette lettre. S’il n’y a plus la distinction entre moi et mon émotion, je suis identifié à l’émotion, je suis emporté par l’émotion (…)
    Arnaud

    « Ici, maintenant, vous êtes la peur », « You are fear ». Swâmiji

    You are fearMais si je suis la peur, je suis identifié à ma peur. C’est ce que je croyais mais je me trompais. Plus tard, Swâmiji a précisé dans un entretien : « Dans l’identification, il y a deux : moi emporté par l’émotion douloureuse et en même temps moi qui-refuse-et-qui me débats ». C’est Swâmiji qui m’a permis de comprendre vraiment la différence qui existe entre : « to be carried away », « être emporté » et au contraire : « To be One with », « être Un avec », ce n’est pas du tout l’identification habituelle.
    (…) Il n’y a pas de distinction, de séparation, de division entre l’écran et le film. L’écran est à la fois complètement un avec le film et jamais affecté. L’ego lui ne peut pas être un avec, que ce soit un ressenti pénible ou un ressenti heureux. Il a son monde personnel, composé de ce qu’il veut ou ne veut pas, de  ce qu’il espère ou craint pour le futur. Il est cet ensemble d’exigences et de refus par rapport à l’existence et n’a aucune neutralité. Il faut être immensément vigilant pour que ces mots sanscrits célèbres, « témoin », « spectateur », « observateur », ne soient pas subtilement récupérés par l’ego pour fuir les émotions engendrées par les événements qu’apporte l’existence.
    Arnaud

    (…) La voie nous propose d’adopter une attitude complètement nouvelle qui consiste à accueillir l’émotion. Au lieu qu’il y ait moi et mon émotion, en pleine dualité, je tente de faire un avec l’émotion.
    (…) Nous tentons de nous unifier avec l’émotion, de devenir un avec l’émotion et non pas emportés malgré nous par celle-ci.
    Je vous invite, quand il y a émotion, à vous réjouir « Voilà une occasion de mettre en pratique, de voir si j’ai bien compris et de tenter ce qui m’est proposé ». Ne vous occupez pas de la situation, aussi horrible qu’elle paraisse, car comme le répète souvent Arnaud : « il n’y a pas de problèmes, il n’y a que des situations : le mental en fait des problèmes ». Ne vous occupez pas de la situation soi-disant horrible et tentez simplement de goûter simplement l’émotion qui se déploie en vous (…)
    Véronique

    Extrait de « LA TRAVERSÉE VERS L’AUTRE RIVE – Rencontres au Mexique » de Arnaud et Véronique Desjardins – Editions Accarias – L’Originel – 2010.

  • Le Poème de la Sainte Liturgie (extrait 1)

    La vie nous révèle à nous mêmes. Comme une capacité d’infini!

    poeme de la sainte liturgieC’est là le secret de notre liberté

    Rien n’est à notre taille

    et l’immensité même des espaces matériels

    n’est qu’une image de notre faim

    Toute barrière nous révolte

    et toute limite exaspère nos désirs

    C’est aussi la source de notre misère

    Une « capacité » n’est qu’une aptitude à recevoir

    Une capacité d’infini est une indigence infinie,

    qui exige d’être comblé avec une urgence

    proportionnelle à ses abîmes

    Ce n’est pas notre corps, bien évidemment,

    qui n’est qu’un point dans l’univers,

    que nous devons cette ampleur illimitée du vouloir

    Notre âme s’y révèle, et la qualité des nourritures

    qui doivent nous combler : c’est dans l’invisible seulement

    qu’elles peuvent se rencontrer, dans l’univers intérieur de l’Esprit

    Notre chair même doit y trouver accès

    et s’assouplir à ses exigences immatérielles

    si toute une part de nous- mêmes

    ne doit pas rester étrangère

    à notre suprême réalisation

     

  • Les visions d’Arnaud sur le monde

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    Au printemps 1998, Nouvelles clés fête ses dix ans d’existence : nous demandions à quelques dizaines d’amis dont Jacques Salomé, Paule Salomon, Anne Dambricourt, Xavier Emmanuelli, Théodore Monod, Bernard Werber.. de projeter pour nous leurs rêves et cauchemars et de partager avec nous leurs visions du présent et de l’avenir.

    Voici les visions d’Arnaud :

    Ma vision positive

    Je sens arriver un véritable réveil spirituel de qualité que préparent tous les tourbillons actuels, du dialogue interreligieux aux fantaisies du New Age, en passant par les aberrations caricaturales de certaines sectes, tous sont de signes précurseurs d’un très grand changement dans les mentalités : la quête de sens est aujourd’hui cruciale, elle trouvera à s’exprimer de manière universelle et cela passera par la rencontre entre les traditions.

    Ma vision négative

    Si l’on veut parler de menaces, je pressens qu’il y aura des accidents concrets, techniques, car la machine est devenue tellement complexe qu’un rien peut l’enrayer. Montréal et le Québec sont restés paralysés sans électricité ni chauffage pendant plusieurs jours, tout simplement parce que les conditions climatiques avaient changé : au lieu d’un grand froid et de la neige; il y a eu un petit froid mais très givrant.  De plus je crois – le monde et le système se dégradant- qu’il va y avoir de plus en plus de réactions de violence dues au désespoir, des mouvements de foule exploités par des meneurs fanatiques.

    Je pense que le travail de chacun sur soi, s’il est fait vraiment, influence quelques personnes autour de soi qui en influencent d’autres, etc. Il y a de plus une influence subtile qui fait que le maître zen Deshimaru pouvait dire :  » Votre méditation influence le cosmos tout entier? « 

    Arnaud dans l’ouvrage : Réponses pour le Présent

    Conversations avec Marc de Smedt

     

  • Viva Télérama

    Ah, ah, ah…quel titre énigmatique que celui-ci !

    telerama2Mireille et moi sommes abonnés à ce journal depuis assez longtemps. Et, hier, quelle ne fut pas pas grande surprise quand je suis allé chercher le dit journal à la boîte aux lettres. Quel titre en pleine page d’ouverture ? Je vous le donne en mille : Le SILENCE

    Eh oui!

    Alors, je ne résiste pas à vous partager l’éditorial que j’ai bien aimé.

    NE JAMAIS RENONCER

    « Pas question de se taire dans le monde absurde et sauvage d’aujourd’hui, où les guerres et le terrorisme ne cessent de massacrer des centaines d’innocents ; où les réfugiés sont rejetés ; où des vieillards se font égorger dans les églises au moment même ou ils célèbrent la communion entre les hommes. Ce n’est pas à un silence apeuré et passif que vous invite Télérama dans ce numéro double. Mais à ce silence qui est écoute, attention profonde aux êtres vivants quels qu’ils soient, à la voix secrète des choses, et à l’environnement. Pour mieux les respecter, les penser avec lucidité. Pour éviter qu’ils soient davantage malmenés dans le chaos de nos sociétés sidérées, de nos gouvernements dépassés par la barbarie. Le silence pour se recueillir, mieux réfléchir et agir, continuer à se faire entendre. Non, dans un brouhaha complaisant qui s’apitoie et ne s’adresse qu’à soi mais dans un bruit qui dénonce et résiste, chante et défie. A travers leurs vœux de silence, les grands mystiques ont souvent communié le plus ardemment avec la souffrance des hommes, ont voulu l’alléger de leurs prières, en même temps qu’ils menaient de grands combats, intérieurs comme extérieurs. Le silence n’est jamais renoncement. Mais partage au plus haut, au plus brûlant.

    Fabienne Pascaud

  • ZERO NO LIMIT (5) – Enjoy and celebrate

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    Cinq heures du matin face à l’océan

    Le jour se lève

    Les vagues terminent leurs rondes de nuit

    Je me tiens bien en veille, à l’abri

    Prêt à tout pour fêter la vie

     

    Je m’incline

    Devant tellement, tellement plus grand

    Comment ne pas voir la lumière

    Surgie du fin fonds de l’océan

     

    Comment ne pas être merci

    Devant un tel prodige

     

    Je m’incline, je m’agenouille

    Face à face au mystère et plutôt démuni

    Nous, les êtres humains

    Nous les êtres humains

     

    Devant une telle démonstration de puissance

    Souveraine, invincible, infinie

    Tout ceci nous ramène à notre humble condition

    A nous de saisir la chance

    Pour nos plus hauts desseins

     

    Être heureux et en paix

    Y  a il plus beau destin?

    Nous, les êtres humains!

    Nous, les êtres humains

     

    Je m’incline, je m’agenouille

    Devant tellement plus grand

    Devant un tel prodige

    Nous, les êtres humains

    Nous, les êtres humains